Fin de la visite du Secrétaire général adjoint de l’ONU en RDC

7 nov 2009

Fin de la visite du Secrétaire général adjoint de l’ONU en RDC

Kinshasa, 6 novembre 2009- Le Secrétaire général adjoint de l'ONU en charge des opérations de maintien de la paix, Alain Le Roy, a quitté Kinshasa le vendredi 6 novembre après un séjour d'une semaine en RDC, dont dans trois provinces de l'Est où il a constaté une amélioration de la situation humanitaire et sécuritaire par rapport a sa dernière visite il y a un an. Alain Le Roy a annoncé aussi le lancement d'une équipe conjointe d'investigation FARDC-MONUC à Lukweti et la suspension du soutien de la MONUC à certaines unités des FARDC.

Son parcours l'a conduit dans trois provinces de l'Est (la Province orientale, les Nord et Sud Kivu) et lui a permis d'échanger avec les autorités nationales congolaises, notamment le 1er Ministre Adolphe Muzito, les présidents des deux chambres du parlement, les Ministres de la Défense et des Affaires étrangères et le vice-ministre de l'intérieur. Le Secrétaire général a eu aussi l'opportunité de rencontrer d'autres interlocuteurs congolais, notamment les autorités provinciales, des représentants des forces vives et de la société civile. La veille de son départ de Kinshasa, M. Le Roy s'est entretenu avec la presse locale et internationale.

Comme bilan de son séjour, M. Le Roy a relevé une amélioration de la situation sécuritaire, comparativement à l'année dernière à la même époque où a-t-il dit, il y avait une forte tension et le CNDP campait à la porte de Goma. Cette situation de l'année dernière à Goma, a-t-il dit, relève du passé, «et c'est un signe positif . Il a indiqué que certes, il y a encore beaucoup de choses à régler, mais que le pays est sur la voie de sortie de crise et donc sur la bonne voie. Dans la région, il a noté l'amélioration des relations entre la RDC et ses voisins. C'est le cas entre le Rwanda et la RDC où il y a eu même des échanges d'ambassadeurs. «Tout ça ce sont de très bons signes de l'amélioration de la situation». S'il a aussi dit que des progrès ont été faits dans la lutte contre les FDLR, il en de même de l'intégration des groupes armés locaux dans l'armée nationale. Mais a-t-il précisé, «il faudrait aller beaucoup plus loin pour arriver à une armée professionnelle, républicaine et disciplinée, et je crois que la MONUC est toute prête à apporter son assistance»

Le Secrétaire général adjoint a tout autant reconnu l'importance de Kimia II que sa complexité. Il y a eu des succès militaires importants a-t-il dit, citant le fait que plus de 1200 ex-combattants FDLR aient pu être rapatriés dans leur pays, tout comme un chiffre similaire de personnes à charge. Mais en même temps, a-t-il poursuivi, l'opération Kimia II à laquelle la MONUC apporte un soutien logistique et opérationnel est une tâche complexe, surtout par rapport à son mandat qui consiste à protéger les populations. M. Le Roy a fait état de l'implication de certains éléments des FARDC dans des violations graves contre les civils dans une zone du Masisi au Nord Kivu. «Nous avons découvert la tuerie [aux alentours] de Lukweti qui a été perpétrée de façon délibérée. C'est évidemment un crime très important et ce sont les directives du Conseil de sécurité qui consistent à dire que nous ne pouvons pas soutenir une unité qui porterait atteinte de façon forte aux droits de l'homme et la évidemment des civils ont été ciblés et c'était extraordinairement grave» a-t-il souligné, faisant allusion à une brigade des FARDC, notamment la 213ème, impliquée dans cette tuerie de Lukweti. Une enquête préliminaire du Bureau conjoint des Nations unies aux droits de Homme a conclu qu'aux moins 62 civils dont un nombre significatif de femmes et d'enfants avaient été tués.
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Et c'est pourquoi d'ailleurs a précisé Alain Le Roy, un certain nombre de mesures conservatoires ont été prises. Il s'agit notamment de «la suspension immédiate du soutien de la MONUC à la 213ème brigade», mais aussi de l'ouverture d'une enquête, conjointement avec les autorités militaires de la RDC.

Le Secrétaire général adjoint a toutefois clairement expliqué que cette suspension du soutien logistique et de l'appui opérationnel de la MONUC à l'unité des FARDC, ne mettait pas en cause le soutien de la MONUC aux FARDC en général, ni à l'opération Kimia II. «Il y a un engagement très fort de la MONUC de continuer son engagement aux cotés des FARDC dans l'opération Kimia II qui est très importante pour neutraliser les FDLR...» a indiqué Alain Le Roy avant de préciser que le maximum sera fait «pour protéger les civils».

En réponse à une question sur la décision de suspendre le soutien de la MONUC et son lien avec le rapport de Human Right Watch qui accuse la MONUC de soutenir une armée qui viole le droit humanitaire international, Alain le Le Roy a souligné que la MONUC a réagi par rapport au résultat d'une enquête interne. Il a expliqué que la MONUC n'a pu déployer une mission d'enquête qu'au mois d'octobre, sans oublier les difficultés pour accéder aux témoins du fait d'absence d'infrastructures de communication dans cette région.

Plus loin, à propos du mandat de la MONUC, puisque l'actuel arrive à expiration, M. Le Roy a noté que le prochain mandat pourrait « être assez proche des termes de celui d'aujourd'hui » au cœur duquel se trouve la protection des civils, même s'il dit qu'une reconfiguration devrait être faite après discussions avec les autorités souveraines du pays.

«La situation étant apaisée, le mandat devrait être reconfiguré» devait-il préciser.

Rappelons qu'avant de regagner Kinshasa mardi, le Secrétaire général adjoint, accompagné du Représentant spécial du Secrétaire général de l'Onu pour la RDC, Alan Doss, et du Commandant de la Force, le Lieutenant général Babacar Gaye s'était rendu dans plusieurs localités de la Province Orientale, des Nord et Sud Kivu où il a rencontré les autorités provinciales mais également les acteurs de la société civile ainsi que les populations.

A Dungu le Secrétaire général adjoint s'est renseigné sur le déploiement et les actions des Casques bleus dans les Haut et Bas Uélé, ainsi que sur les préoccupations des autorités locales et des agences humanitaires. Il s'est informé sur les efforts de l'équipe DDRRR, qui a installé une équipe permanente à Dungu pour encourager les éléments résiduels de la LRA à se rendre. Il a également échangé avec des officiers des FARDC pour mieux apprécier les défis auxquels ils font face, surtout en ce qui concerne leur mobilité. Les populations de cette vaste région, trois fois la taille du Sierra Leone, font toujours face à l'insécurité à cause des actes de banditisme et des actions éclaires de la LRA qui, bien qu'elle soit considérablement amoindrie, opèrent dans certains endroits.

La plupart des interlocuteurs rencontrés apprécient la présence des troupes de la MONUC dans la région. Les Casques bleus faut-il le préciser mènent des patrouilles quotidiennes et fournissent un soutien logistique et opérationnel à quelques 6 000 éléments FARDC déployés dans la zone. Ceux-ci reçoivent toutes les semaines de la MONUC quelque 23 tonnes de rations alimentaires. La base et sa piste d'atterrissage construites et entretenues par la MONUC servent à faciliter la livraison de denrées humanitaires ainsi qu'au déploiement et soutien aux FARDC. Tout en se félicitant des efforts de la MONUC, l'administrateur territorial a fait un plaidoyer pour une assistance humanitaire et sécuritaire plus importante. Le renforcement des effectifs de la MONUC avec l'arrivée prochaine des Casques bleus tunisiens dans la zone augmentera la capacité d'escorte et celle concernant les autres activités de protection.

Faisant escale à Bunia, M. Le Roy s'est rendu à Marabo et Nyakunde, respectivement à 45 et 50 Km au sud de Bunia, dans le territoire d'Irumu. A Marabo, la délégation a rencontré un groupe de femmes vulnérables, notamment les victimes de viol et de violences. S'adressant à M. Le Roy, la porte-parole du groupe a souligné la nécessité de mieux protéger les habitants de la zone pour leur permettre d'accéder à leurs champs. Bien que la paix soit revenue en Ituri, elle a noté que les femmes continuent à souffrir de harcèlement, de viol et d'autres violences perpétrées par les milices et les forces de sécurité. Elle a néanmoins remercié la MONUC pour tout le travail qui a été fait pour ramener la paix dans la région.

A Nyakunde, M. Le Roy a visité le Centre Médical Evangélique, qui traite les femmes victimes de viol et de violences sexuelles. La représentante des femmes a mentionné 1300 cas de viols depuis 2006. Toutefois, elle a souligné que, c'est grâce à la paix de la MONUC qu'elle est revenue à Nyakunde. Aussi, a t-elle appelé l'ONU à apporter plus de sécurité pour la zone et à protéger les personnes contre les incursions des milices.

Le Secrétaire général adjoint a assuré les femmes d'un soutien continu de l'ONU pour ramener la paix durable dans la région. Il a souligné le fait que la responsabilité de la sécurité relève avant tout du ressort du gouvernement, mais la MONUC a-t-il indiqué continuera à fournir un appui aux FARDC et aux efforts des autorités pour mettre fin à l'impunité.

Dans le Nord Kivu, la délégation a visité les localités de Ntoto et Nyabiondo, à la limite des territoires de Walikale et Masisi. Ntoto, considérée comme zone sensible, parce que ancien bastion des FDLR, reste aussi un exemple du bon fonctionnement des mécanismes mis en place par la MONUC pour protéger les populations civiles. Ntoto dispose d'une base héliportée implantée depuis le 18 août dernier, où les Casques bleus, tout en assurant la protection des populations, grâce au plan local de protection mise en place avec l'équipe conjointe de protection, soutiennent l'unité DDRRR qui travaille au rapatriement des combattants FDLR.

La base de Ntoto compte une trentaine de Casques bleus, déployés non loin du village où vivent quelques 2 000 habitants. Le compound de la base sert de refuge aux villageois, car les Casques bleus y ont construit des tranchées de protection pour la population en cas de besoin. Dans cette zone enclavée qui ne dispose pas de routes pour le passage des véhicules, les Casques bleus font des patrouilles à pied aux alentours du village situé dans une forêt dense où se cachent des FDLR. Ils accompagnent aussi le personnel civil qui cherche à renforcer la communication avec les habitants. Comme quelques 1 500 soldats FARDC viennent d'être déployés à Ntoto, la MONUC les aide en fournissant du ravitaillement par hélicoptère et en faisant des vols de reconnaissance. Les Casques bleus font aussi ce qui relève du possible pour les encadrer et les aider à renforcer la discipline.

Là-bas, le personnel de la MONUC a expliqué à M. Le Roy que depuis l'établissement de la base, quelques 450 familles déplacées sont revenues au village. L'équipe conjointe de protection venait de faire sa deuxième descente sur le terrain à Ntoto pour s'assurer de l'efficacité des dispositifs mis en place pour la protection des populations. Au sein de cette équipe figurent des spécialistes en droits de l'Homme, en matière de protection de l'enfant et des violences sexuelles.

A Nyabiondo, le Secrétaire général adjoint et sa délégation ont visité une base à l'échelle d'une compagnie de la MONUC. Il s'est renseigné sur la situation sécuritaire dans la zone nord de Nyabiondo où de récents combats ont eu lieu entre les FARDC et les éléments armés de l'APCLS qui ont refusé le désarmement et l'intégration dans l'armée congolaise. Le commandant de la base MONUC a expliqué que ces affrontements ont déplacé les populations vers la base. Il a aussi fait part des mesures prises par les Casques bleus pour rassurer les populations, telles que les escortes pour le marché, les réunions de sécurité avec les autorités et les chefs des localités ainsi que les patrouilles pédestres. Les Casques bleus ont fait état d'autres activités au bénéfice de la population, telles que l'assistance médicale et la mise en œuvre des projets civilo-militaires. M. Le Roy a également rencontré des officiers des FARDC et de la PNC, ainsi que les représentants de plusieurs localités de la région, lesquels ont fait état de leurs préoccupations quant à l'insécurité et aux défaillances des FARDC et de la PNC. L'une des raisons du déplacement du Secrétaire général adjoint à Nyabiondo était justement liée aux résultats de l'investigation préliminaire du Bureau conjoint des droits de l'Homme sur les violations des droits de l'homme dans la zone de Lukweti.

Dans le Sud Kivu, M. Le Roy s'est entretenu à Bukavu avec le Vice Gouverneur de la province, M. Jean Claude Kibala. Le Secrétaire général adjoint a aussi visité la base de la MONUC à Sange et le centre de formation de Luberizi où les Casques bleus de la MONUC donnent les rudiments de base militaires à quelques 1000 anciens combattants de groupes armés intégrés dans les FARDC.