Revue de presse du 23 janvier 2006

24 fév 2009

Revue de presse du 23 janvier 2006

Les affrontements, le week-end dernier, entre les troupes loyalistes et les éléments du général déchu, Laurent Nkunda, font la Une de la plupart des journaux parus à Kinshasa ce lundi.
« Un calme précaire semble régner actuellement dans les localités de Rumabango, Bunagana, Jomba et d'autres localités du territoire de Rutshuru, six jours après l'offensive lancée par des groupes armés sous la conduite de l'ex-général Nkundabatware », écrit L'OBSERVATEUR. Les FARDC et la MONUC reprennent le contrôle de Rutshuru, titre le journal. « Le gouverneur de la province du Nord-Kivu, le commandant de la 7e Région militaire ainsi que les responsables de la MONUC ont foulé le sol de ce territoire pour se rendre compte de la situation », poursuit le quotidien.

LE PALMARES rappelle les faits : mercredi dernier, la 83e brigade de l'ex-ANC, branche armée du RCD (Rassemblement Congolais pour la Démocratie), avait lancé, une offensive sur les positions de la 5e brigade intégrée des Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC), commandée par le colonel Jean-Marie She Kasikila. Dans la nuit de jeudi à vendredi, les localités de Tongo et Bunagana, à environ 140 km au nord-est de Goma, dans le territoire de Rutshuru, étaient passées sous contrôle des assaillants. Le vendredi 20 janvier et le samedi 21 janvier 2006, ces éléments armés, « à l'époque soutenus par le Rwanda », selon LE PHARE, « qui continuent de s'opposer à l'opération salutaire de brassage de l'armée, se sont rebellés contre le gouvernement central en attaquant des cibles stratégiques dans la région ». Ils ont mis sous leur contrôle, poursuit ce journal, plusieurs localités du territoire de Rutshuru, à seulement 75 km de Goma. Les combats ont provoqué l'exode de plusieurs centaines de personnes parmi lesquelles des femmes et des enfants, des personnes malades, des personnes âgées, vers des villages situées hors des zones d'affrontement, fait savoir L'OBSERVATEUR.

Ce général déchu qui avait brièvement occupé la ville de Bukavu en juin 2004 et qui dirige les assaillants, est qualifié de « poison pour le Congo » par L'OBSERVATEUR et LA REFERENCE PLUS. Ces assaillants auraient réussi à prendre le contrôle de six localités, affirme ce quotidien. « Hier soir, une source militaire de l'état-major des FARDC annonçait la reprise, par les troupes loyalistes de cinq localités », écrit le journal. Des unités indiennes et sud-africaines de la MONUC ont été déployées à Rutshuru, fait savoir LE POTENTIEL. « Appuyées par des hélicoptères de combat et des chars, elles ont entrepris de déloger les insurgés (...) Tard dans la soirée, on parlait de cinq localités reconquises, sur les six », écrit le quotidien.

« Peut-on dire que la guerre est terminée au Nord-Kivu avec le semblant de retrait des hommes de Nkundabatware ? », s'interroge pour sa part L'AVENIR. Abandonnant les localités occupées, Nkundabatware regagne sa cachette indique en manchette cette parution. « La population du Nord-Kivu estime que rien n'a changé. Tout ce qu'on a pu observer, c'est que les soldats qui occupaient des localités dans le territoire de Rutshuru ont fait semblant de se retirer », souligne le journal. « La population, selon les informations recueillies de Goma tard hier, a vu des troupes rentrer à Ruwengeri au Rwanda, après un pillage en règle », poursuit-il. Citant des sources captées à Goma, le quotidien souligne que des soldats de l'APR (Armée Patriotique Rwandaise) « sont restés, avec la complicité des autorités militaires et politiques de la province et ont mis l'uniforme congolais ». Il redoute que demain, non seulement « ces soldats soi-disant congolais » refusent de se soumettre au brassage mais aussi « qu'ils récidivent en troublant la paix dans cette partie du pays ».

Pour LE PHARE, Les élections sont menacées par Nkunda et "alliés". « La nouvelle campagne de Nkundabatware compromet de manière sérieuse l'avenir du processus électoral à l'Est de la RDC », écrit de son côté FORUM DES AS.

A en croire ce journal qui pointe du doigt le Rwanda, le souci de Kigali est de garder son emprise sur le Nord-Kivu et ce serait « l'un des mobiles qui le pousse à entretenir l'aile extrémiste du RCD qui se cache derrière la nébuleuse rwandophone congolaise ». Citant des analystes, le quotidien établit un lien entre les attaques de Rutshuru et l'arrivée annoncée du Chef de l'Etat congolais dans le Nord-Kivu, « après ses succès retentissants au Maniema, au Sud-Kivu et dans la Province Orientale ». Les Rwandophones tentent d'empêcher Joseph Kabila de visiter Goma, titre-t-il en première page. L'attaque de Rutshuru constitue, pense-t-il, l'un des obstacles « dressés par le RCD et ses officiers pour ralentir le processus de transition en RDC ». « Des observateurs prêtent également à l'aile extrémiste du RCD l'intention d'empêcher, par ce coup de force, le voyage du Chef de l'Etat à Goma », affirme LA REFERENCE PLUS.

Le RCD ayant perdu au parlement la bataille sur les listes bloquées, certains de ses membres seraient tentés par cette aventure militaire de Laurent Nkunda, poursuit cette parution. La reprise de la guerre au Nord-Kivu serait un moyen pour le RCD d'imposer des négociations politiques sur cette matière, « en espérant négocier en position de force », écrit le journal. Sous le titre Laurent Nkunda : les dessous de l'attaque, LA TEMPETE DES TROPIQUES parle d'une « curieuse coïncidence entre l'opération armée de l'ex-général dissident et le rejet du mode de scrutin basé sur les listes bloquées ». Les Tutsi congolais qui se considèrent comme une communauté minoritaire en RDC étaient tous favorables à l'adoption du système des listes bloquées, note le journal. Lequel système, souligne-t-il, est perçu par le RCD, parti du vice-président Azarias Ruberwa en charge de la commission Politique, Défense et Sécurité, « comme seule voie de salut pour se retrouver dans différentes institutions de la 3e République ». « De là à croire que l'insurrection qui vient de prendre pied dans le Nord-Kivu serait liée, entres autres, à cette frustration, il n'y a qu'un pas que certains observateurs n'hésitent pas à franchir », écrit le quotidien.

Pour beaucoup, indique L'OBSERVATEUR, l'attaque de Rutshuru « serait l'occasion pour les dissidents du RCD de régler leurs comptes au colonel She Kasikila, commandant de la 5e brigade intégrée « qui s'est illustré, ces dernières semaines dans l'identification des fosses communes dans cette partie de la République », que FORUM DES AS considère comme l'une des plus meurtries « par les armées rwandaises d'occupation ». A ce sujet, un haut dirigeant du RCD aurait, plus d'une fois, appelé le colonel Kasikila « pour lui faire comprendre qu'il s'occupait de ce qui ne le concernait pas », à en croire LA REFERENCE PLUS. La présence du commandant actuel de la 5e brigade intégrée ne fait « ni l'affaire du RCD, ni de Kigali », renchérit FORUM DES AS. Selon le journal et LA REFERENCE PLUS, le colonel Kasikila serait encerclé et Laurent Nkunda chercherait à le capturer.

Autre coïncidence relevée par L'AVENIR et FORUM DES AS, la présence à Kinshasa de l'ancien évêque d'Uvira, Mgr Jérôme Gapangwa, « accusé jadis d'avoir financé la guerre d'agression à partir du diocèse d'Uvira qu'il pilotait », relevé de ses fonctions par feu le pape Jean-Paul II et éloigné d'Uvira, « à cause de son engagement pour la guerre ». L'AVENIR dénonce « les messes noires » organisées dans la capitale par « le père spirituel d'Azarias Ruberwa », dans l'enceinte de la paroisse Sainte-Anne.

« Les regards des Congolais sont tournés vers la MONUC », écrit le journal. La MONUC placée devant ses responsabilités, titre dans la foulée LE POTENTIEL. « Ces combats doivent interpeller tout le monde pour qu'on y réfléchisse sérieusement afin que le processus de transition se poursuive jusqu'à terme. La MONUC est principalement concernée dès lors que le Secrétaire Général de l'ONU, Kofi Annan, a publiquement déclaré que les Nations Unies ne toléreront plus que la paix soit troublée en RDC. Cet engagement doit être respecté. Faute de quoi, la MONUC sera taxée de complice », écrit cette parution.

La MONUC affirme suivre attentivement le développement de la situation militaire dans le Nord-Kivu ; « elle assure qu'elle va continuer à remplir sa mission première qui est celle de sécuriser et de protéger la population civile », rapporte LE PHARE qui précise que la Mission onusienne a pris des mesures pour que la situation demeure sous contrôle et qu'elle a déployé deux compagnies à Rutshuru. « Malgré tout ce dispositif militaire avec couverture aérienne, la MONUC privilégie "une résolution pacifique des conflits" » et dans ce cadre, une rencontre est prévue entre les dissidents, le gouverneur de province, le commandant de la 8e région militaire et celui de la brigade-MONUC au Nord-Kivu, indique le quotidien. « C'est une bonne chose que la MONUC, malgré la logistique dont elle dispose, privilégie le dialogue avec les insurgés. Au-delà du dialogue entre "belligérants", il serait indiqué de penser élargir l'assiette des interlocuteurs aux forces politiques et sociales en marge des institutions de la transition comme au processus électoral », écrit le journal. « Si on accepte de négocier avec ceux qui tuent, pillent et violent, ce serait une grosse erreur d'ignorer ceux qui, à l'image de l'UDPS (Union pour la Démocratie et le Progrès Social) revendiquent pacifiquement leur droit à un environnement politique et social devant réellement préfigurer l'état de droit », conclut LE PHARE.

Au sujet de la réouverture des bureaux de vote, Joseph Kabila pourrait débloquer, pense le même journal en manchette, qui affirme que trois semaines après l'annonce de l'implication de l'UDPS dans le processus électoral, « la situation paraît toujours bloquée ». Selon LE PHARE qui cite certains analystes, l'intervention du Chef de l'Etat « est de plus en plus souhaitée ». Cela permettrait à Joseph Kabila de marquer « un point indiscutable sur le plan psychologique » et de conforter le discours qui a toujours été le sien : « conduire les Congolais aux élections, quoi qu'il en coûte, dans la paix et la réconciliation ».

A en croire LE POTENTIEL, Les évêques du Congo approuvent "les listes ouvertes". La conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) a « apprécié à juste valeur » l'adoption, par le parlement, de l'option du système à listes ouvertes ; ce qui, rapporte le journal, fera respecter « l'intention des électeurs et donnera aux députés le sentiment de légitimité et une certaine fierté d'être mandatés par le souverain primaire. Ce qui ne serait pas le cas si on avait opté pour le scrutin à liste bloquée et "zébrée" qui n'exprime pas nécessairement la préférence du lecteur ».