Verbatim Conférence de Presse, Général Babacar Gaye, Commandant Force MONUC du 17-10- 2007

13 fév 2009

Verbatim Conférence de Presse, Général Babacar Gaye, Commandant Force MONUC du 17-10- 2007

TRANSCRIPTION VERBATIM DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE
DU GÉNÉRAL BABACAR GAYE, COMMANDANT DE LA FORCE DE LA
MISSION DES NATIONS UNIES EN RDC,

KINSHASA, 17 OCTOBRE 2007
Kemal Saiki, Directeur du Bureau du Porte-parole et des Relations Médias : Mesdames et messieurs de la presse Bonjour. Merci pour votre fidélité à ce rendez-vous hebdomadaire de l'information avec la MONUC. Bonjour également aux auditeurs de Radio Okapi en RDC et à travers le monde entier grâce l'internet.

Lors de cette conférence de presse nous aurons parmi nous le général Babacar Gaye qui va nous rejoindre et qui est le Commandant en chef de la Force de la MONUC, la mission de maintien de la paix des Nations unies en République démocratique du Congo (RDC). Comme vous le savez, le général vient d'effectuer une visite dans le Nord Kivu, à Goma et il aura l'occasion de vous entretenir de la situation militaire dans le Nord Kivu et de répondre à vos questions. Je suis certain que vous serez intéressés par sa présence et que vous aurez probablement de nombreuses questions pour lui. Nous accueillons donc le général Babacar Gaye. Mon général, bienvenue. Merci d'être ici et de prendre le temps de vous adresser à la presse et aussi aux congolais par l'intermédiaire de Radio Okapi.

General Babacar Gaye : Merci infiniment Kemal. Je salue nos auditeurs ainsi que les journalistes. J'ai tenu à venir moi-même à la conférence de presse pour être à la disposition de la presse, parce qu'il y a des événements qui interpellent la Force dans la mesure où récemment dans le territoire de Masisi, alors que nous étions en soutien des FARDC, un soutien dont la dimension est très symbolique, parce que nous étions venus évacuer des blessés, nos casques bleus ont reçu des jets de pierre de la part de la population, ce qui traduit vraiment une incompréhension, je pense, de la nature de notre action, ainsi que de son intensité. Hier, il m'a été rapporté que des soldats des FARDC qui venaient d'arriver à Goma, ont eu, vis-à-vis, de la MONUC des attitudes moins amicales que d'habitude, cela aussi m'interpelle. Il ne faut pas que cette tendance se développe. Donc c'est pourquoi, j'ai tenue à venir devant la presse, en espérant que les questions qui me seront posées, me permettront d'élaborer plus sur la question.

Kemal Saiki : Merci mon général pour la brièveté de vos propos et pour nous laissez ainsi plus de temps aux questions que les journalistes ne manqueront pas de poser. Qui voudrait prendre la première question ? N'oubliez pas, comme d'habitude, de vous présenter et d'indiquer le media pour lequel vous travaillez.

Eyenga Sana, journaliste « Le Potentiel »: Mon général, nous sommes très préoccupés par cette situation de Goma. Nous voulons avoir des précisions. Dans quelle localité, y a-t-il eu ce genre d'attitude de la population vis-à-vis des éléments de la MONUC. Aussi, quelle est la stratégie que la MONUC propose ? La MONUC est liée à la résolution 1756 du Conseil de Sécurité et nous voulons avoir plus de précision sur ce sujet ?

Général Babacar Gaye : Votre question est relative à l'attitude de la MONUC par rapport à son mandat. Je crois que cette une question est très importante. Notre mandat est très clair. Sa partie la plus importante est la sécurité des populations. C'est pour cela que nous sommes déployés dans des bases opérationnelles mobiles. C'est pour cela que nous escortons des convois humanitaires. C'est pour cela que nous sommes proches de tous les regroupements de personnes déplacées. Je vous donnerai un exemple. A Kilolirwe, où nous sommes présent autour des populations, nous avons vu qu'il y avait une progression des diarrhées. Nous avons immédiatement fait les diagnostics et envoyé nos comptes rendus aux humanitaires. Pour l'instinct, nous sommes les seuls présents. Par rapport à la protection des populations, il y a une action silencieuse et permanente. Je ne sais pas comment les populations du Nord Kivu ressentent cela, parce que c'est à elles de dire, si elles ont un sentiment de sécurité chaque fois que la MONUC est présente. Bien sur là où nous ne sommes pas présent, nous ne pouvons pas l'être, puisque nous n'avons pas des effectifs extensibles à l'envie. Mais ceci est très important, nous sommes les seuls actuellement dont l'action prioritaire est la sécurité des populations. Les autres militaires qui sont présent n'ont pas cette priorité. Mais nous, c'est notre priorité.

Ensuite, nous avons un mandat qui est d'apporter notre soutien au déroulement d'un processus politique. Cela a été clairement rappelé par notre Représentant Spécial qui, lors de sa dernière intervention devant la presse, a dit qu'il appelait tous les dissidents de tous bords à aller au brassage, sans délai et sans conditions. Ensuite, nous avons également le mandat qui est d'apporter notre soutien aux FARDC. Nous ne passons pas notre temps à dire tout ce que nous faisons dans le cadre de ce soutien, mais il y a des moments où il faut le rappeler, pour que les populations sachent que toute l'aéromobilité, c'est à dire tous les transports aériens qui sont faits à l'intérieur des Kivus, où il n'y a pas beaucoup de terrains d'aviation, sont faits par les hélicoptères de la MONUC. C'est nous qui, le 26 septembre, avons transporté des renforcements à Katalé au profit du colonel Yav. C'est nous qui avons évacué les blessés. C'est nous qui avons transporté les munitions. C'est nous qui avons donné pas moins de 22 000 rations de combat qui sont des alimentations pour les FARDC. Parce que nous avons demandé au Conseil de Sécurité de nous en donner l'autorisation pour éviter que les gens ne vivent sur les populations. Donc nous mettons en œuvre notre mandat, comme d'habitude, avec discernement et détermination. Et ça, je tenais à le préciser.

Karin Kabutu, Raga Télévision : La MONUC est toujours du coté des FARDC dans l'est de la République et le gouvernement a lancé un ultimatum au général dissident Nkunda pour qu'il rejoigne le centre de brassage, lui et ses hommes. Mais apparemment, il n'a pas l'intention de déposer les armes. Vous, qui êtes au coté des FARDC, dites nous comment résoudre de manière durable et efficace ces problèmes de l'Est, pour qu'on en finisse une fois pour toutes.

Général Babacar Gaye : Je pense qu'il faut donner à des solutions pacifiques, toutes les chances possibles d'être mises en œuvre. Ce n'est pas une faiblesse de la part d'aucunes des parties prenantes que de donner une chance aux solutions pacifiques. C'est dans l'intérêt des populations, qui sont encore une fois les premières à pâtir de cette situation. Je pense que la manière de donner une chance à une solution pacifique, c'est d'améliorer la communication. Hier, j'ai vu à la télévision des hautes autorités civiles s'adresser à des éléments qui avaient choisi de rejoindre les FARDC qui se préparaient à être transportés vers un centre de brassage. Je crois qu'il faut multiplier ce genre d'actions pour appeler les gens à la raison. Il n'y a pas d'autre choix que le brassage sans délai et sans conditions. La pression militaire qui a été exercée sur le terrain à contribué certainement à la reddition de ces éléments. Il est clair qu'il faut maintenir cette pression militaire. Il est probable qu'il y aura un moment où cette pression militaire, on sera obligé de la traduire en offensive parce qu'on n'aura pas su faire entendre raison à ceux qui sont aujourd'hui des dissidents. Il y a donc un plan par étape. Et si tous les modes d'actions non agressifs ne produisent pas d'effet, nous serons contraints malheureusement d'en arriver à une solution militaire.

P. Chibangu, « Alerte plus » : Mon général, une opinion soutient que votre appel à Laurent Nkunda de se remettre sans délai au brassage, au moment où a expiré le délais de l'ultimatum lancé par le gouvernement, est un moyen que la MONUC a usé pour protéger cet ex-général, afin de ne pas subir la force de frappe des feux des FARDC et d'arrêter cette offensive. Comment pourriez-vous expliquer une telle position ?

Général Babacar Gaye : Je réponds toujours que les faits sont sacrés et les commentaires sont libres. Chacun est libre de commenter les événements comme il veut. Maintenant, s'il s'agit de nous demander quelle est notre opinion sur la question. Je vous voudrais rappeler qu'il y a quand même des faits qui se sont passés, à Saké, au début de l'année, où c'est nous la MONUC et nous seuls qui avons arrêté l'avancée des éléments de Laurent Nkunda vers Goma, au prix de pertes qui ont fait réfléchir ceux qui avançaient. Donc, déjà, si on nous juge sur ces faits là, je crois que l'opinion que l'on veut faire avancer, que la MONUC serait plus au moins complaisante voir même que la MONUC serait, je ne pas dire complice mais cela ressemble quand à même ça, ce que l'on dit... Je crois que cette opinion ne tient pas la route pour parler de manière triviale. Il est du devoir de la communauté internationale d'inviter toutes les parties à des solutions pacifiques à des situations de crises. C'est notre devoir de le faire et nous le faisons vraiment sans honte. Notre option privilégiée est que les gens aillent au brassage sans délai et sans conditions et de manière pacifique. Maintenant, si l'on n'y arrive pas, il est clair qu'il y a un gouvernement élu et des autorités légitimes et qu'il est de leur devoir de protéger les populations. Ce n'est la responsabilité d'aucune personne, autre que la responsabilité du gouvernement légal de ce pays. Dans ce cadre là, vouloir faire à la MONUC le procès de soutenir Laurent Nkunda, certains sont allés même plus loin, disant que nous apportions des soutiens en armes, des soutiens en tenues, etc., je crois que ça relève du fantasme. Il faut être raisonnable. Les positions de Nations Unies sont très claires. Elles sont claires au niveau politique et elles sont également claires sur le terrain.

Primo Nzela, Canal Congo Télévision, Radio Liberté Kinshasa: Mon général, ma première préoccupation est que vous nous expliquiez le paradoxe entre votre soutien et le comportement de la population et des FARDC à votre égard. Il est paradoxal que l'armée puisse bénéficier d'un tel soutien, tel que vous avez énuméré et puis qu'on remarque que les FARDC ont un comportement moins amical envers les militaires de la MONUC. Ma deuxième préoccupation est celle concernant le brassage. Les congolais craignent que les soldats rwandais recrutés par Nkunda puissent infiltrer les rangs de l'armée congolaise. Vous qui êtes aux cotés des autorités des FARDC, comment pensez-vous que le brassage actuel puissent éviter un tel fait ?

Général Babacar Gaye : Je commencerai par la deuxième question. Tout ce que nous pouvons faire dans le processus de brassage, c'est ce qui est prévu par le plan national PNDDR. Nous mettons en place des centres de regroupement où nous accueillons des combattants. Nous les désarmons et nous leur donnons des certificats de désarmement. Il appartient ensuite aux autorités congolaises de proposer à ces ex-combattants le choix entre l'intégration où le retour à la vie civile, comme il appartient aux autorités congolaises de faire le tri entre ceux qu'ils leur apparaîtraient comme des nationaux et des non-nationaux. Ce n'est pas notre responsabilité. En ce qui concerne le premier point, vous avez parlé d'un paradoxe. Je suis heureux et j'espère que vous saurez dans vos différentes publications donner encore plus d'emphase à ce mot paradoxe. Car ce paradoxe traduit le fait qu'il y a une mauvaise perception d'une réalité ou une perception biaisée d'une réalité. C'est dans ce sens que je suis d'accord avec vous, qu'il y a un paradoxe. Maintenant ce paradoxe est-il le fait d'une frustration de la population qui a énormément souffert et qui voudrait que des solutions rapides soient trouvées aux origines de sa souffrance ? Est-ce que c'est parce que nous sommes, comme toujours, les Nations Unies, le bouque émissaire idéal ? C'est peut-être cela les raisons du paradoxe. En tous cas, j'ai le sentiment que s'il y a une communication juste et impartiale sur la question, tous les termes du paradoxe seront levés. Et c'est pour ça que je suis ici devant vous.

Georges Tamba, Agence France Presse : Je voudrais, général, que vous nous disiez clairement où et quand les troupes de la MONUC ont essuyé des jets de pierre ?

Général Babacar Gaye : Je saurai vous le dire très précisément juste après la conférence de presse. C'est un incident qui n'a pas eu un impact médiatique très important mais pour nous, il est révélateur parce que, bon, quand même nous sommes en train d'évacuer des soldats qui sont blessés pour les FARDC et que les populations qui sont là, qui assistent aux événements, ont ce genre de réaction là, ça nous interpelle

Simon Kinsanga, Journal Demain le Congo : Mon général, je voudrais vous poser une question que j'ai posée il y a quelques mois, ici, à un civil. Vous êtes militaire, comment à l'allure actuelle et surtout vu la recrudescence aujourd'hui, comment voyez vous l'Est du Congo sans la MONUC ?

Général Babacar Gaye : Vous savez, le Représentant Spécial, M. Swing lorsqu'il reçoit des hôtes et nous recevons beaucoup de visiteurs parce que, grâce à Dieu, le Congo est toujours au centre de l'agenda de la communauté internationale. Lorsqu'il reçoit des visiteurs qui ont le sentiment que les choses ne vont pas très bien, M. Swing a l'habitude de leur dire, si vous voyez les choses avec un appareil photo, c'est vrai vous n'avez pas tort, si vous faites une vidéo, comme c'est le cas parce que nous nous faisons une vidéo qui a démarré depuis 1999, alors là, bien sûr les progrès sont considérables. Je pense qu'il va y avoir certainement au début du mois de novembre une réunion, une table ronde sur la réforme du secteur de la sécurité. Il est très heureux de constater qu'en même temps que la situation se développe sur le terrain, militairement, au niveau de Kinshasa, il y a des réflexions très approfondies sur l'avenir des FARDC. Il y a une volonté très nette du gouvernement de se préparer à la relève de la MONUC qui est un fait inéluctable. Mon appréciation personnelle est une appréciation disons, empreinte de beaucoup d'optimisme. Les choses avancent bien. Vous les voyez avancer en Ituri, vous voyez les choses avancer également dans le Nord Kivu. Ce sont des processus qui prennent du temps, qui sont des processus de réconciliation, de démobilisation, de retour à une vie normale, ça ne peut pas se faire du jour au lendemain donc si vous me demandez comment je vois les choses, je pense que les choses vont aller dans le bon sens. Il faudra malheureusement, peut être, payer un prix pour cela, mais cette évolution à mon avis est inéluctable.

Philémon Loungounia RTGA Télévision : Juste des précisions mon général sur le soutien concret qu'apporte la MONUC aux FARDC. Quel soutien, de quel ordre ? Et, en rapport avec la fin de l'ultimatum, est-ce qu'il y a une ou des opérations militaires avec les FARDC, que vous envisagez, que ce soit du point de vue pacifique ou juste opérations militaires pour désarmer les miliciens de N'Kunda. Si vous voulez donner plus de chances à la voie pacifique et si les FARDC, puisque vous avez dit que le gouvernement est responsable de la sécurité des personnes et de leurs biens, si les FARDC décidaient de continuer l'offensive, que ferait la MONUC ? Est-ce qu'elle sera toujours comme observatrice ou elle va aussi prendre part ?

Général Babacar Gaye : Je commencerai par votre dernière question. Vous dites s'il y a une offensive est-ce que la MONUC serait observatrice ? La MONUC n'a jamais été observatrice. Je viens de vous dire que le 26 septembre, c'est nous qui avons transporté les renforcements au profit du Colonel Yav qui était en difficulté à Katalé. C'est ça être observateur ? Je vous ai dit que nous avons transporté pas moins de 12 tonnes de munitions au sein du Nord Kivu pour les FARDC. Vous savez le soutien est multiforme et je pense que c'est faire beaucoup de respect au gouvernement congolais que leur dire mettez vous en avant, c'est le meilleur investissement que vous puissiez faire pour l'avenir, c'est que vos armées règlent le problème avec notre soutien, plutôt que de nous mettre en avant et de faire le travail pour vous. Je crois que c'est une forme de respect et c'est le meilleur investissement pour l'avenir. Vous voulez en savoir plus sur le soutien ? Nous avons évacué plus de 100 FARDC blessés par hélicoptères, 74 d'entre eux ont été traités dans nos hôpitaux militaires de la MONUC à Goma. Nous avons apporté une assistance aux FARDC pour faire des reconnaissances aériennes de toute la zone d'opérations du Nord Kivu pour savoir où sont leurs éléments et quelle est la situation sur le terrain.

Vous savez bien comment nous sommes déployés à Goma et à Saké pour interdire que ces villes qui sont importantes ne tombent entre les mains de gens qui ne sont pas des gens qui doivent les contrôler, etc., etc. Donc, il y a un réel soutien sur le terrain et comme je vous l'ai dit tout à l'heure, c'est nous qui assurons actuellement l'aéromobilité des FARDC. Quand les FARDC veulent bouger des gens, vu l'état des routes, vue la situation, nous apportons notre soutien pour cela. Vous demandez maintenant quelle sera l'attitude de la MONUC en cas d'opérations.... Mais ce n'est pas nous bien sûr qui déclencherons les opérations. Mais ce que nous avons déjà fait là, nous continuerons à la faire en cas d'opérations et nous avons donné nos conseils aux FARDC, pour leur dire, avant d'en arriver à des modes d'action létaux et agressifs, essayez tous les modes d'actions non-létaux et non-agressifs avant d'arriver à ça. Vous pouvez obtenir la même situation en prenant plus de temps. En somme au lieu, disons d'achever vos adversaires, étouffez les dans un premier temps, contrôlez les points importants d'accès, de ravitaillement et tout. Donc, il y a un dialogue entre les FARDC et nous et c'est notre mandat. Il y a un soutien qui est apporté aux FARDC. Voilà ce que je peux vous répondre.

Jean Bedel, CBS : Mon général, je suis heureux d'avoir d'entendu que vous disiez qu'il pourrait avoir un prix à payer pour que la situation se rétablisse à l'est de la République. La MONUC qui ne s'est jamais caché de vouloir, avec raison d'ailleurs, préférer la paix à la guerre, d'autant plus que tout cela éviterait toutes ces catastrophes humanitaires que nous connaissons. Est-ce que ce prix à payer, mon général, ne serait pas finalement l'option militaire ? Évidemment, les populations auraient à mourir mais, une fois pour toute, on aurait réussi à rétablir la paix en RDC.

Général Babacar Gaye : Vous savez, je répète très clairement ce que j'ai dit. J'ai dit que nous apportons notre soutien aux FARDC. Il ne faut pas qu'il ait de paradoxe sur la question. Ce que je veux également dire très clairement, c'est que nous, nous sommes une force de maintien de la paix. Nous ne serons jamais ceux qui diront que la solution d'un problème est une solution militaire car les problèmes politiques doivent trouver des solutions politiques. C'est pour cela que notre Représentant Spécial a fait un appel très clair pour dire que les gens doivent aller au brassage sans délai et sans conditions, parce que c'est ça qui est légitime et légal. Maintenant, si, malheureusement, tout cela n'était pas fait, il faudra s'attendre à ce qu'il y ait des opérations militaires. Et malheureusement, ces opérations militaires s'accompagneront pour les populations des mêmes souffrances et elles s'accompagneront aussi pour les soldats des souffrances qu'il ne faut pas ignorer. Il y aura parmi eux des morts et des blessés, des deux cotés malheureusement. Et, je crois que ce pays n'a que trop souffert de morts et de blessures. Il n'y a eu que trop de sang versé et si nous pouvons l'éviter, ce serait tant mieux pour tout le monde.

Alain Kabongo, Journaliste « Le Phare »: Le général vient d'avouer quelque chose qui vient de frapper mon attention. Il vient de dire qu'il y a des problèmes politiques, qui exigent des solutions politiques. Est-ce que vous pouvez expliciter un peu cette idée? Est-ce que dans le conflit actuellement au Nord Kivu, il y a réellement des problèmes politiques ? Quels sont-ils au juste ? Je voudrai aussi savoir, au regard des revers que Nkunda subit ces derniers temps, est-ce que les insurgés contrôlent encore une quelconque localité au Nord Kivu? J'aimerais également savoir, si la MONUC est au courant d'un quelconque mandat international que le gouvernement aurait lancé contre Nkunda? Parce que j'ai suivi, hier, le ministre de la défense qui disait qu'après l'expiration de l'ultimatum, le gouvernement pourrait être clément à l'égard des éléments insurgés mais qu'il sera très ferme à l'endroit de Nkunda qui doit être arrêté. La MONUC, est-elle au courant d'un mandat d'arrêt international lancé contre Laurent Nkunda ?

Général Babacar Gaye : Je laisserai le Porte-parole de la Mission répondre à cette dernière question, s'il le veut bien. Tout à l'heure, vous avez demandé quels sont les problèmes politiques que j'évoquais. Je l'ai clairement dit. Vous avez quelqu'un qui à la prétention d'assurer la sécurité d'une minorité. On ne peut pas denier à une minorité d'avoir un sentiment d'insécurité. Donc, il faut rappeler à cette personne qu'il y a un gouvernement légitime dont c'est la responsabilité d'assurer la sécurité de toutes les communautés. S'il y a des sentiments, s'il y a des perceptions comme quoi une communauté ne se sent pas à l'aise, peut-être appartient-il de prendre des initiatives à son endroit pour lui prouver qu'il en ait rien. Voila le problème politique tel que je le perçois. Je crois que ca ne vaut pas la peine d'une guerre, de morts, et des déplacés sur les routes.

Maintenant, en ce qui concerne les localités contrôlées par ceux que vous venez d'évoquer. Il y a au moins 1000, 2000 ou 3000 personnes qui jusqu'à présent ont des armes à la main et répondent aux ordres de Laurent Nkunda. Ces gens ne sont pas entre ciel et terre, ils sont bien dans des localités, si petites soient telles. Ils sont s'en doute dispersés, mais ils sont bien dans les localités. S'agissant du mandat d'arrêt, je donne la parole à Kemal Saiki.

Kemal Saiki : Nous allons conclure là-dessus. Je remercie le général d'être venu parmi nous et c'est aussi l'heure pour nous de rendre l'antenne à nos collègues de radio okapi. Mais nous allons poursuivre notre rencontre hebdomadaire. Mon général, un mot de conclusion.

Général Babacar Gaye : Le mot de conclusion que je voudrai donner, Kemal, c'est celui d'un appel à la presse pour qu'elle ne contribue pas à rendre encore plus complexe une situation qu'il l'est déjà suffisamment et dans laquelle les enjeux sont la vie de personnes qui sont actuellement en situation très précaire au Nord Kivu. C'est dans ce sens que j'ai voulu clarifier que, aussi bien sur un plan politique que militaire, nous avions, la MONUC, des attitudes que je qualifierai de très saines, dans la mesure où nous apportons un soutien qui est conforme à notre mandat et que nous continuons à promouvoir des solutions qu'éviteraient des morts et des blessés supplémentaires. Il n'y a aucune équivoque à notre niveau mais il y a des positions de principes que nous avons le devoir de tenir et que toutes les personnes de bonne volonté devraient partager avec nous.